Cela fait déjà 4 ans que je me passionne pour ce sport. Depuis mes débuts, je l’observe évoluer sous toutes ses facettes. À première vue, ce sport est jeune et attractif, et attire de nombreux adeptes de sports extrêmes, prêts à relever un défi de taille. En surcroît, son développement explose d’année en année, il est littéralement exponentiel. En 2010, lorsque « Spartan Race » créa la première course à obstacles au Québec, il n’y avait personne qui pouvait prédire que ce sport allait être autant diversifié après seulement 7 ans. Aujourd’hui, il y a de nombreuses courses indépendantes ainsi que plusieurs franchises de course, créant ainsi un calendrier comblé de plus de cinquante courses à obstacles. Pour un néophyte, c’est à s’y perdre littéralement, car il n’est pas évident de quantifier avec exactitude la difficulté de chaque course. Une course facile pour moi pourrait être très exigeante pour une autre personne. La cause première est l’absence de balises réglementaires quant aux dénivelés, au nombre d’obstacles et aux distances à parcourir. En effet, chaque course possède ses propres règlements et standards de réussite. Le développement rapide et le manque de réglementation de ce sport favorise ce chaos empêchant par le fait même la création d’une fédération sportive pour le moment.
Alors, comment une recrue peut y voir clair dans ce brouillard incongru?
Au début, cela commence toujours plus ou moins pareil, le néophyte a été invité par ses amis ou il s’est lui-même lancé le défi de participer à une CAO. Il a choisi la course sans savoir dans quoi il s’embarquait exactement. Il a entendu dire que celle-là est moins exigeante que l’autre. Bref, une fois qu’il a réussi son défi, il ressent soit un engouement énorme ou non pour ce sport. Advenant la première option, la deuxième course n’attendra pas l’autre. Il s’abonne à des groupes spécialisés comme CAOQUÉBEC, OCR MANIAC, OCR NATION et 3-SECONDS. Après un certain temps, il veut affronter de nouveaux défis plus exigeants, mais il a de la difficulté à saisir les nuances entre chaque type de course, se fiant donc donc au calendrier de « 3-seconds » qui note les degrés de difficulté des courses offertes. La communauté des CAO lui prodigue aussi de bons conseils au besoin. Au total, il s’inscrit à une vingtaine de courses différentes, il les consomme tous avec passion et avidité. Après quelques années, la passion s’estompe graduellement, ne laissant plus que l’habitude et les amis à rejoindre aux courses. Puis, à un certain moment, le vétéran arrête de concourir dans les CAO. Nous en connaissons tous un, c’est même probablement lui qui vous a d’abord initié au CAO. Ce phénomène m’a toujours intéressé.
La passion ardente s’est évaporée aussi vite qu’elle est arrivée. Que s’est-il passé ?
D’abord, comme décrit plus haut, l’absence de standards joue un rôle déterminant. À long terme, le flou crée des frustrations et des indignations face aux sports que vous aimez. L’aspect compétitif sera toujours affecté par ce chaos tant et aussi longtemps que les standards de réussite ne seront pas tous les mêmes pour chaque course. Le vétéran compétitif laissera entrer tranquillement dans son esprit un début de cynisme. Puis, il y a la surconsommation des courses. En fait, cet aspect est propre à chacun. Par contre, un fait qui est souvent rapporté par ceux qui finissent par arrêter ce sport est qu’ils ont participé à plus d’une vingtaine de courses par été pendant quelques années. Cette surconsommation a eu pour effet de diminuer l’appréciation général du vétéran. De plus, il est à la recherche de nouveauté d’innovation. Certaines séries de course sont à l’avant-garde et d’autres non. Il est une fois encore buté à des frustrations puisque l’innovation est plus lente chez les grosses franchises qui offrent des courses plus exigeantes. Pourquoi ils innovent peu ? La réponse est fort simple et évidente, les compagnies veulent rentabiliser l’achat de leurs modules et de leur schéma de course (la réutilisation du même site pendant plusieurs années limite la créativité). Aussi longtemps que les participants seront au rendez-vous, pourquoi changer une formule gagnante ? Le vétéran se voit alors consommer les mêmes courses et voit les mêmes problèmes d’année en année, sans mentionner qu’il est témoin des mêmes lacunes liées aux standards de réussite. Le cynisme grandit en lui sans qu’il s’en rend compte et le goût amer et répétitif qu’il ressent dans son esprit commence à être lourd. Il s’aventure alors à regarder les courses de trail ou tous autres sports connexes et il finit par changer ses habitudes. Il y a aussi un point essentiel qui favorise le décrochage à ce sport, c’est l’aspect économique. Les courses en trail de la MEC coûte rarement plus de 30 $. Cela même pour courir une course de 40 km et en bonus, le participant ne rapporte pas un camion de sable chez lui. En conclusion, il existe plusieurs raisons non-mentionnées qui mènent au décrochage, et qui mériteraient d’être soulignées comme les blessures chroniques.
À mon avis, les courses à obstacles ne sont pas une passion à combustion spontanée. Ce phénomène, je l’ai vue à plusieurs reprises à travers d’autres sports. Pour prévenir une ‘’écœurantite’’ aiguë et le cynisme, il faut modérer sa consommation, ses attentes et mieux cibler ses défis. Il ne faut pas oublier que ce sport est très jeune et qu’il continuera à se développer. Nous serons témoins de spécialisation comme le défi Xtraining ainsi que la création de nouveau sport connexe au CAO comme les Blackout. Nous serons aussi témoin de faillite comme la Battlefrog. Quand le sport atteindra sa maturité, une fédération verra le jour.
Le mot de la fin, la modération a toujours meilleur goût.
Un texte de Vincent Grenier